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Justice et Police, les deux anges noirs des sociétés humaines, et pour ce qui nous concerne, les deux anges noirs de la République.

Anges parce que d’essence protectrice - les anges gardiens.

Noirs parce que ne devant leur existence que par celle des noirceurs de l’être humain.

Anges parce que redresseurs de torts voués au rétablissement et au maintien des droits.

Noirs parce que porteurs potentiels de l’autre face du miroir : injustice et insécurité.

Tous les écrits destinés à décrire l’ordonnancement d’une société, tels les lois, les Constitutions ou même le programme ici décliné, seraient voués à de simples déclarations d’intentions s’ils n’étaient adossés à des moyens concrets de les faire appliquer.

On parle ici de cadres contraignants posés au cœur du Contrat Social et définis de façon à être acceptés par tous.

Pourquoi les accepter ?

La réponse est tristement évidente. Il n’y aurait nulle nécessité de recourir à la contrainte, si les hommes et les femmes étaient tous des êtres d’amour et de bienveillance, désintéressés et dont les besoins primaires étaient totalement satisfaits. Mais personne ne changera la nature humaine ni nos conditions de vie sur Terre, ni ne réprimera, fort heureusement, nos aspirations personnelles qui vont bien au-delà de la satisfaction des besoins primaires qui sont manger, boire, se loger et se sentir en sécurité.

Ce constat n’offre d’autre choix que d’adhérer à cette sorte de Contrat Social - immergé actuellement dans la Constitution, la Déclaration des Droits de l’Homme et la somme de toutes les lois, codes civil, pénal, etc … -, Contrat qui décrit le cadre social et ses contraintes.

Ce Contrat, immergé dans ces écrits, dispose de la question des droits et devoirs des citoyens, et à l’endroit des devoirs, il dispose, entre autres, des sujets de Police et de Justice.

Se posent alors plusieurs questions :

à qui confier les prérogatives de Police et de Justice,

comment nous garantir des excès de ces pouvoirs et

jusqu’où accepter ces contraintes ?

Bien qu’on lise ici ou là que Justice et Police sont des attributs régaliens (signifiant "du Roy"), il est acquis, sur la foi de l’injonction de séparation des pouvoirs, que la Police est dévolue à la responsabilité de l’Exécutif, et la Justice à une autorité dédiée, indépendante du Gouvernement.

En l’état, on voit déjà que la séparation des pouvoirs est loin d’être aboutie en France puisqu’en matière de Justice, les juges du Parquet sont sous administration gouvernementale et que les juges du Siège sont sous audit de l’Etat (depuis janvier 2017) et redevables de leur budget et de leurs carrières.

Un autre problème se pose et non des moindres : comment se garantir des excès des instances de Police (gérées par l’État), d’une part, et des excès du pouvoir univoque des juges, d’autre part ?

On redira ici, comme dans d’autres chapitres du programme, que l’Exécutif est sous mandat parlementaire et, par conséquent, ses pouvoirs de Police aussi. Ce qui devrait suffire à limiter les excès sécuritaires puisque le parlement est censé être la voix du Peuple. Reste à revenir sur les lois qualifiées de "liberticides" qui ont fait florès, particulièrement ces dernières années, et à en amender l’exercice habituel.

Quant à l’indépendance de la Justice - même dans l’hypothèse où elle était enfin instaurée -, il resterait à circonscrire le pouvoir donné à de "simples mortels" de juger des agissements de leurs concitoyens.

Si dans le cadre des Assises, le problème se veut être contourné par l’instauration de jurys populaires, la plupart des instances juridiques ne font appel qu’au jugement de seuls magistrats.

De telles procédures, confiées à une seule autorité et à une seule personne sans contre-avis et sans contrôle tierce, hypothèquent l’exigence de tendre à l’impartialité, et contreviennent à celle d’un contre-pouvoir efficient, alpha et oméga de toute procédure démocratique populaire.

Rendre justice est une mission bien trop grave pour la laisser à des experts aussi clairvoyants soient-ils.

Il est vrai que la partialité des décisions de justice est une préoccupation parfois présente à l’esprit des services de l’État puisqu’on a vu surgir des solutions telles l’instauration de collèges de magistrats ou bien le dépaysement de certains procès, mais celles-ci restent loin d’être satisfaisantes.

On se trouve aussi devant un autre problème. Celui des moyens mis en œuvre pour l’instauration de procédures démocratiques populaires. Par exemple, si on envisageait de multiplier les jurys populaires en toute occasion, nous serions devant un problème pratique plutôt ardu à résoudre au regard du nombre d’affaires à traiter.

La justice. Au nom de qui ?

A poser ainsi la question de l’impartialité des juges, s’ensuit une autre bien plus fondamentale : au nom de qui les juges rendent-ils la justice ?

La réponse est habituellement la suivante : au nom du peuple à travers les lois de la République. L’impartialité tiendrait alors à l’application à la lettre de la loi. Mais alors pourquoi entrer dans un tribunal si la loi dicte par avance tout jugement ? Et qu’est-ce qui justifie les émoluments d’un juge s’il est réduit au seul rôle de bureaucrate de la loi ?

S’en tenir à l’application mécanique de la loi, nous amènerait donc à dénier toute manœuvre d’interprétation de la part d’un juge.

Or, c’est tout le contraire qui se passe.

Les débats juridiques se fondent justement sur un travail d’interprétation. C’est là, même ce qui les justifient. La qualification des faits, leur contexte, le profil psychologique et social des justiciables, les mobiles, les rapports d’experts, l’estimation des circonstances atténuantes ou aggravantes, etc, démontrent l’omniprésence de l’interprétation dans l’énoncé des jugements.

Ainsi dire que la justice est rendue au nom du peuple à travers les lois de la République est une affirmation totalement fausse.

Le juge ne rend pas seulement la Justice, mais il dit aussi la Loi. Dans bien des cas, la Loi n’est qu’un cadre flou voué à toutes les interprétations, interprétations confiées aux juges. En quelque sorte, les juges exploitent une concession de justice accordée sans contrôle a posteriori par les parlementaires.

Si on ajoute que les juges ne sont responsables devant aucune instance et redevables de rien et à personne, nous avons alors un problème.

 

Le cadre étant posé, voici les solutions proposées par Concorde 17.11.